Guerre ou convergence des savoir-faire entre la pub et le conseil ? Avec le digital, la concurrence est acharnée pour créer une expérience client différenciée connectant créativité, stratégie et technologie. Illustration : les stratégies croisées d’Accenture et Publicis. Pub et conseil ont leurs points forts et leurs points faibles.

Si vous n’avez que quelques minutes

Le marché des données personnelles est devenu un enjeu marketing majeur. Le digital gagne la pub et agences de pub traditionnelles et groupes de consulting s’affrontent pour conquérir le leadership.

Les directeurs marketing recherchent des partenaires aussi bien stratégiques que créatifs, avec des compétences multidisciplinaires de conception, de technologie et d’analyse marketing pour les aider à relever les défis auxquels font face les marques.

La pub et le conseil ont des forces et faiblesses différentes. Ils investissent massivement dans le rachat d’agences et de compétences spécialisées (voir la stratégie d’Accenture et de Publicis, exemples choisis ici).

D’autres concurrents comme les GAFAM pourraient changer la donne et détiennent des clés du marché.

Le marché a changé

Nous ne sommes plus dans l’ère des médias de masse ou du marché de masse. Le digital a modifié les comportements de consommation et de communication, plus encore que les modes de production.

La quatrième révolution industrielle et sa vague sans précédent d’automatisation impacte des emplois très variés, y compris les emplois à valence intellectuelle, dont la pub. Paradoxalement elle génère aussi une économie de la consommation où nos données numériques personnelles ont une valeur et génèrent un marché à exploiter.

Sur ce marché de l’intelligence artificielle appliquée au marketing, les agences de pub, spécialisées et traditionnellement bien implantées, rencontrent la concurrence d’autres acteurs, les cabinets conseil et les GAFAM.

Les schémas traditionnels d’achat aussi ont changé. Les acheteurs achètent autrement et sur les nouveaux médias.

Aujourd’hui il n’y a plus de place pour la publicité intrusive, d’après une étude, 91 % des consommateurs se disent davantage exaspérés par les publicités aujourd’hui qu’ils ne l’étaient il y a deux ans

Qu’est-ce qui désormais pousse un client hyper sollicité et en permanence distrait à acheter quelque chose qu’il a vu dans une publicité, et comment est-ce qu’une marque peut l’orienter vers le parcours classique : « attention, intérêt, intention, achat (le fameux tunnel de vente) ? »

Dans ces conditions la publicité en ligne s’envole. L’essor du marché digital est assorti de la chute continue des médias traditionnels. Les parts respectives de la pub de la presse (15,9 %), de la radio (5,6 %) et de l’affichage (9,4 %) se réduisent également, avec une contribution du numérique aux médias traditionnels limitée à 6 %.

Fondamentalement, les annonceurs suivent le public qui a migré vers les nouvelles plates-formes et on a un mouvement de la publicité vers les médias numériques, en particulier vers le mobile qui connaît la croissance la plus dynamique.

Les annonceurs doivent s’adapter

Nous ne sommes plus dans l’ère des médias de masse ou du marché de masse. Le digital a modifié les comportements de consommation et de communication, plus encore que les modes de production.

La quatrième révolution industrielle et sa vague sans précédent d’automatisation impacte des emplois très variés, y compris les emplois à valence intellectuelle, dont la pub. Paradoxalement elle génère aussi une économie de la consommation où nos données numériques personnelles ont une valeur et génèrent un marché à exploiter.

Sur ce marché de l’intelligence artificielle appliquée au marketing, les agences de pub, spécialisées et traditionnellement bien implantées, rencontrent la concurrence d’autres acteurs, les cabinets conseil et les GAFAM.

Les schémas traditionnels d’achat aussi ont changé. Les acheteurs achètent autrement et sur les nouveaux médias.

Aujourd’hui il n’y a plus de place pour la publicité intrusive, d’après une étude, 91 % des consommateurs se disent davantage exaspérés par les publicités aujourd’hui qu’ils ne l’étaient il y a deux ans

Qu’est-ce qui désormais pousse un client hyper sollicité et en permanence distrait à acheter quelque chose qu’il a vu dans une publicité, et comment est-ce qu’une marque peut l’orienter vers le parcours classique : « attention, intérêt, intention, achat (le fameux tunnel de vente) ? »

Dans ces conditions la publicité en ligne s’envole. L’essor du marché digital est assorti de la chute continue des médias traditionnels. Les parts respectives de la pub de la presse (15,9 %), de la radio (5,6 %) et de l’affichage (9,4 %) se réduisent également, avec une contribution du numérique aux médias traditionnels limitée à 6 %.

Fondamentalement, les annonceurs suivent le public qui a migré vers les nouvelles plates-formes et on a un mouvement de la publicité vers les médias numériques, en particulier vers le mobile qui connaît la croissance la plus dynamique.

Le digital gagne la pub partout dans le monde

Le 74ème rapport d’Advertising Age qui publie chaque année depuis 1945 un classement des plus grandes agences de pub en fonction de leur chiffre d’affaires confirme le poids du digital. Le rapport est disponible à l’adresse suivante : AdAge.com/agencyreport2018.

Selon ce rapport 2018 d’Ad Age, le numérique a représenté au total 51 % du chiffre d’affaires 2017 des agences américaines dans tous les domaines, avec un taux de croissance de 7 % contre 8 % en 2016. En outre, des sociétés de conseil occupent pour la première fois les places 6 à 10 de la liste des plus grandes agences au monde (voir infra Accenture interactive).

En France, la tendance au digital est comparable.

Véronique Richebois, analyste et observatoire avisé du secteur de la pub aux Echos en fait le constat.  « Les chiffres sont sans appel. Sur l’ensemble de l’année 2018, les investissements publicitaires digitaux en France, en hausse de 17 %, ont permis au marché d’atteindre un chiffre d’affaires net de 4,876 milliards d’euros.

La part de marché du digital dans les médias s’établit désormais à 39,2 % (10% en 2006) répartis entre :

–        le search (45 % du total, soit 2,275 milliards d’euros)

–        et le display et autres leviers (bannières, vidéo…), qui préempte 40 % (soit 1,974 milliard d’euros).

Le display s’envole littéralement, avec une croissance de 30 %, grâce aux réseaux sociaux et, de façon plus globale, des vidéos sur mobile. Le « display social » traduit une hausse de 63 %, soit 22 % du marché global.

Les clients n’hésitent plus à exiger des réductions de coûts, voire à couper dans leurs budgets. Certains annonceurs se verraient bien ne pas ajouter la couche supplémentaire que représente la pub entre leur cabinet de conseil et leurs canaux de communication (réseaux sociaux, moteurs de recherche, site…).

Le modèle de tarification change : sur les marchés numériques l’indicateur clé est le prix de la bannière CPM (Note : coût par milliers de vues d’un espace publicitaire), le coût des données lui est évalué à 0,5 à 2€.

L’économie de la pub en est changée. La tendance est à la simplification du portefeuille d’agences. Si elles ne réagissent pas, les agences de pub sont exposées à un risque de paupérisation accru du métier et de concentration du secteur, déjà amorcé.

Pub et conseil en concurrence

Les cabinets conseil prennent appui sur le digital pour s’attaquer au marché de la publicité et du marketing et le mouvement est rapide, pour les conseils comme pour les agences de pub traditionnelles.

La question est de savoir si les annonceurs recherchent :

  • des agences « digital natives » qui maîtrisent dès le départ les compétences digital et ont les compétences technologiques requises a priori : ils les trouveront dans le conseil,
  • Ou s’ils attendent de leurs agences de pub traditionnelles, dans un secteur qu’ils connaissent bien, qu’elles s’adaptent et leur offrent des services nouveaux, à l’état de l’art, qu’elles les développent elles-mêmes ou achètent les compétences nécessaires.

Dans les deux cas, la cible client est la même :  les directions générales et plus souvent les directeurs marketing qui cherchent des solutions et des compétences pour les aider à repenser tous les aspects de l’expérience client et utilisateur.

L’urgence stratégique est présente des deux côtés, les agences ciblées pour un rachats sont souvent les mêmes. Il faut consolider ou gagner un marché, en acquérant de nouvelles compétences expertes dans les domaines des données et de la transformation d’entreprise (les annonceurs).

Pour Accenture, par exemple, ce mouvement obéit à une logique stratégique et est dans la suite logique de son plan de transformation. « Début 2011, quand j’ai pris mes fonctions, l’équation était simple : le cycle de quinze ans des services informatiques classiques s’essoufflait, il nous fallait un plan de transformation pour prendre la nouvelle vague de la croissance. » indiquait Pierre Nanterme avant sa disparition.

Les deux logiques de recherche de relais de croissance ont leur rationalité et leur part de marché à développer. L’enjeu est de savoir quels seront le modèle dominant et le ou les futurs leaders.

Dans un double mouvement, les consultants veulent descendre dans la chaîne de valeur, et les agences, remonterPour réussir, la pub et le conseil – hier outsider- ont leurs forces et leurs faiblesses.

Les forces du conseil

Le conseil, nouvel entrant sur le marché, ne manque pas d’atouts.

Pour illustrer ces avantages du conseil, le choix a été fait de s’appuyer sur l’exemple et la stratégie d’Accenture Interactive, mais cette analyse ne se veut pas exhaustive. D’autres cas pourraient être analysés notamment chez les Big.

On ne reprendra pas en particulier dans cet article la longue énumération (difficile à suivre) des cabinets rachetés par les uns ou par les autres acteurs depuis les années 2010 et suivantes.

  • Croissance et développement rapide.

Le rapport annuel d’Ad Age classe les agences selon leur chiffre d’affaires en 2017 dans le monde et aux Etats-Unis. Accenture Interactive a déclaré le chiffre d’affaires le plus élevé de tous les réseaux d’agences digitales, qui atteignait déjà 6,5 milliards de dollars pour l’exercice financier 2017 d’Accenture (clos au 31 août 2017) et n’a fait que progresser depuis, soit une croissance de 35 % sur douze mois.

Accenture a obtenu en 2018 les classements suivants :

  • N°1 des 15 plus grands réseaux d’agences digitales au monde.
  • N°1 des 25 plus grands réseaux consolidés d’agences.
  • N°6 des 25 plus grandes agences au monde

Accenture incarne ainsi les atouts du conseil qui sont nombreux.

  • Organisation et expertise intégrée.

Le cœur de métier du conseil est l’organisation. Le modèle des agences des cabinets conseil est construit de manière à assembler le bon mix de transformation digitale et organisationnelle qui inscrit le marketing dans la stratégie globale de l’entreprise et permet d’offrir les meilleures expériences client possibles.

Le conseil a une vision globale de l’entreprise, mobilisant différentes équipes, et compétences, notamment la connaissance pointue du consommateur via leurs études et Benchmark sectoriels. En travaillant directement sur le tunnel d’achat des annonceurs, la communication se rapproche ainsi du marketing. Donc, du stratégique. On peut, par exemple, corréler directement les opérations de communication aux indicateurs clés de performance, une campagne peut ainsi amener à modifier la stratégie, l’organisation interne, voire la structure marketing de l’annonceur.

  • Globalisation.

Autre point fort et une proposition qui fait mouche sur le marché : un point d’entrée unique pour le client et une capacité à orchestrer des projets, avec une couverture internationale.

C’est là l’un des atouts majeurs du réseau d’Accenture, notamment vis-à-vis de concurrents comme WPP ou Omnicom, souvent embarrassés par la lourdeur de leurs structures héritées de plusieurs décennies d’acquisitions de réseaux et la gestion de marques concurrentes.

  • Modèle économique.

Enfin, le modèle économique proposé est plus clair : il repose sur une facturation au prix de journée, parfois plus simple que les modèles de prix des agences, surtout pour les offres complexes ou multicanal.

La demande des annonceurs est de faire évoluer les modèles de rémunération de la pub vers du revenue sharing, de la prise de risque, payer pour des résultats et non pour du temps passé ou des projets.

  •  Relation dirigeant.

Les grands cabinets, notamment les Big ou Accenture qui ont une stratégie offensive dans le domaine, conseillent les plus grands groupes mondiaux, dans la banque, le commerce ou l’industrie. Ils ont accès directement aux PDG, aux directeurs informatiques et maintenant aux directeurs marketing.

Leur présence partout dans le monde renforce leur attractivité.

  • Taille et niveau d’investissement.

La capitalisation en Bourse d’Accenture est nettement supérieure à celle de ses « concurrents » comme : WPP (22,8 milliards), Omnicom (17 milliards) et Publicis (15,5 milliards).

Accenture ne détaille pas son plan de marche mais le groupe a déjà procédé à 3,4 milliards de dollars d’acquisitions en trois ans et envisage d’en faire encore 1,1 à 1,4 milliard d’ici à la fin 2018, soit 25 % à 30 % de sa trésorerie disponible. « Les investissements dans nos autres métiers, notamment dans l’analytique ou l’intelligence artificielle, renforceront aussi les services d’Accenture Interactive ».

Dernière acquisition en date d’Accenture :  Drogba 5, le choix de la créativité pure (Vs l’acquisition d’un réseau international). Présente à New York et à Londres, l’agence revendique 200 millions de revenus pour 2017 et emploie 500 collaborateurs. La réputation créative de Drogba 5, fondée en 2006, n’est plus à faire. Son patron fondateur, David Drogba, figure comme le créatif le plus primé de l’histoire des Cannes Lions. Quant à Drogba 5, elle a été nommée « Agence Indépendante de l’Année » une vingtaine de fois.

Le choix d’Accenture Interactive n’en est que plus intéressant, le géant du conseil semblant avoir privilégié la créativité pure à la puissance de frappe d’un holding publicitaire doté de plusieurs réseaux (comme Publicis dont on a parfois dit qu’elle pourrait être rachetée).

  • Des spécialistes aux commandes.

En France, Accenture a ainsi engagé en 2016 un ancien de WPP, Claude Chaffiotte, pour diriger Accenture Interactive dans l’Hexagone. Plus récemment, le groupe a débauché l’ancienne patronne de Rosetta, une des principales filiales digitales de Publicis aux États-Unis, pour prendre les rênes des activités en Californie, ou encore, au début du mois, Nikki Mendonça, la présidente du groupe OMD (Omnicom) dans la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique), pour diriger son pôle d’intelligence marketing.

  • Des rémunérations plus attractives.

Les agences de pub se plaignent d’une surenchère salariale : « Un chef de publicité issu d’une grande école est recruté en moyenne à 2.300 € mensuels. Les consultants recrutent au même niveau à 4.500 €. Ces deux salaires étaient identiques il y a quinze ans. (dixit TBWA) ». Mais le modèle RH du conseil, quoique sélectif (up or out) est souvent plus précis et attentif au développement des compétences individuelles et collectives.

  • (Mais) Des risques d’intégration et de normalisation des discours.

« Il s’agit de savoir intégrer des expertises dans un ensemble plus vaste sans en perdre le sel », complète Claude Chaffiotte, directeur d’Accenture Interactive en France et au Benelux, évoquant une « culture des cultures », quand les concurrents soulignent les difficultés culturelles que représente l’intégration d’ingénieurs avec des créatifs.

Autre risque souligné par la pub : l’uniformisation des solutions. Les groupes ont réfléchi avec les mêmes consultants, se sont appuyés sur les mêmes solutions technologiques, les plates-formes client, et convergent à présent vers le même type de propositions de valeur. Le risque est que les discours soient identiques et une grande indifférenciation aux yeux des consommateurs.

Les atouts des agences de pub

Les atouts de la pub dans le combat actuel sont également solides. A commencer par des rachats stratégiques.

L’exemple de Publicis et sa stratégie d’acquisition sont convergents avec un modèle conseil.

  • Dès le début des années 2000, l’ancien « informaticien » de Publicis, Maurice Lévy, avait eu l’intuition de la métamorphose du marché de la communication qu’allait entraîner le tsunami digital, additionnant les développements dans le numérique avec les acquisitions de Razorfish, Digitas, LBi
  • Rachat de Sapiens fin 2014 pour 3,7 milliards
  • Avril 2019 : acquisition du spécialiste américain de l’analyse des données de comportement des consommateurs (CRM), Epsilon, pour plus de 4 milliards de dollars (3,5 milliards d’euros).

Concrètement, Publicis bénéficiera d’une équipe renforcée de 3.700 « data scientists », d’équipes technologiques et d’experts en intelligence artificielle. Plus stratégique encore, en acquérant Epsilon, numéro deux mondial du CRM derrière Deloitte Digital et devant Wunderman (WPP) avec un chiffre d’affaires de 1,9 milliard de dollars en 2018, le troisième groupe de communication modifie à la fois son ancrage géographique et son positionnement, renforcé sur le digital mais aussi le conseil.

Mais au-delà de ces stratégies digitales, qui varient selon les agences, on note que la pub dispose de solides atouts, y compris bien sûr son historique avec les marques qu’elle a su fidéliser.

  • Une excellente capacité d’exécution opérationnelle.

Les agences de pub sont d’excellentes exécutantes opérationnelles. Si l’annonceur ne ressent pas le besoin de se lancer dans une réflexion globale sur sa transformation, il pourra chercher à aller rapidement sur sa thématique de communication. Les agences savent répondre au brief sans passer au préalable par un audit complet. Elles savent aussi gérer leurs ressources (y compris un volant souvent important de free-lance).

  • Les paradoxes de l’intelligence artificielle.

Les annonceurs se trouvent à la fois dans une phase d’observation et de fascination pour l’intelligence artificielle. Ils savent que cela va bouleverser la vie du consommateur, mais ils n’osent pas toujours franchir le pas.

L’IA est en revanche en train d’entrer de plain-pied dans le monde de la publicité. Mieux, l’industrie commence à la valoriser. « En 2018, 10 % des campagnes primées aux Cannes Lions incorporaient des éléments d’intelligence artificielle, contre 7 % en 2017 et 4 % en 2016 ».

Publicis investit largement sur l’IA avec « Marcel » la première plateforme d’assistance professionnelle propulsée par l’intelligence artificielle et le machine Learning « . Concrètement, Marcel reliera les 80.000 employés du groupe répartis dans 130 pays afin  » d’anticiper les besoins des clients et de libérer la créativité, tout en exploitant le pouvoir de la data pour générer des solutions commerciales « . Révolution ou optimisation ? On retrouve de l’extérieur beaucoup de knowledge management ou d’intranet dans ce nouvel outil intelligent.

L’IA est non seulement un mot à la mode dans la Pubosphère mais elle peut être une ressource pertinente, notamment pour :

  1. Repérer les contenus frauduleux (brand safety).
  2. Améliorer la pertinence et la personnalisation, demain via Google et Facebook par exemple avec les modèles comportementaux prédictifs.
  3. Développer la part du programmatique – les pubs vendues de manière automatisée grâce à des algorithmes.
  4. Rendre la pub plus immédiate et plus rentable, en offrant la capacité de diffuser la publicité au moment opportun et à grande échelle ;
  5. Développer le dialogue avec la marque avec les chatbots – ces robots conversationnels (à l’heure ou l’assistance vocale de développe à grande vitesse) ;
  6. Donner des moyens supplémentaires d’analyser les messages et les images, sous certaines limites.

Sur ce dernier point des progrès sont en cours, pour analyser non seulement des mots clés mais des images clés sur les réseaux sociaux (dans un temps où l’image devient dominante dans la publicité et compte pour 63 % des messages). D’où le lancement par McCann, il y a un an, d’un protocole combinant une analyse quantitative des images par Azure AI (Microsoft) à une analyse plus qualitative et sémiotique via l’intervention humaine d’un binôme composé d’un analyste spécialiste des réseaux sociaux et d’un planneur stratégique.

Autre exemple : le duo Babel-BVA revendique des atouts spécifiques. L’une des filiales, PRS In Vivo, de BVA a développé ainsi la technologie Mobile Eye-Tracking (MET)- ou système de suivi oculaire – qui aide les spécialistes du marketing à voir le monde « à travers l’œil du consommateur » dans son parcours d’achat. Le process ? Les individus acceptent d’être équipés de lunettes MET permettant de voir là où leur rétine se pose en premier.

Dernière innovation à venir (ou pas ?) l’évaluation des agences de pub elles-mêmes. Si l’intelligence artificielle peut désormais concevoir des spots publicitaires, elle peut aussi être capable de juger des campagnes réalisées par des humains

  • L’IA ne remplace pas la pub.

L’usage de l’IA permet à l’humain de se concentrer sur d’autres tâches plus importantes comme l’analyse des cibles ou l’optimisation créative des campagnes. Une bonne création publicitaire aura toujours besoin de se nourrir d’émotions et donc d’implication humaine. Pour séduire le consommateur, son contenu est fondamental. L’analyse de la data requiert elle aussi une implication humaine pour générer les meilleurs enseignements et identifier de nouvelles cibles plus pertinentes pour les marques.

Rodée à traiter un nombre impressionnant de données en un temps record, l’intelligence artificielle peut-elle être créative pour autant ?

  • L’IA peut-elle être créative ?

La pub est un processus complexe qui doit mobiliser divers outils et compétences pour assurer la qualité de l’expérience client – UX, qui se base sur 4 critères d’analyses très précis tels que :

  1. L’émotion (professionnels de l’image et de la communication) ;
  2. La technique (performance et rapidité de l’interface) ;
  3. La statistique (faite par des analystes et experts du marketing) ;
  4. L’ergonomie (pour les professionnels de l’ergonomie traditionnelle ou du design d’interaction).

Si l’IA participe de plus en plus au processus créatif des agences, la démarche de Lexus, par exemple, la création d’un spot sur la base de l’analyse de données en grande quantité sur les campagnes automobiles est encore marginale. Avec ses saynètes les unes après les autres, le film est d’ailleurs loin d’être un modèle du genre. « Il y a encore du chemin à faire avant que l’IA soit capable de provoquer des émotions à grande échelle ».

  • La différence ultime : la connaissance et la défense de la marque. 

« Les acteurs de la pub sont des gens de marques. Ils se concentrent sur l’audience, ses centres d’intérêt et ceux de la marque. Les cabinets de conseil ont plus une logique de transformation de l’entreprise.

Ce qui fait la valeur d’une marque, c’est à la fois la qualité du produit et la valeur émotionnelle que le consommateur attache à ce produit et qui justifie son prix. C’est l’expérience personnelle qu’il en tire et qu’il faut entretenir. La capacité d’une marque à raconter une histoire fait sa valeur. Pour résumer d’une formule, le « storytelling » égale la marge.

En effet, ce qui est en question avec l’économie digitale et des plateformes, c’est l’existence même des marques et plus seulement leur différenciation. Laurent Habib, président du syndicat des agences de communication, AACC, l’explique :

« Les marques doivent incarner un projet clair et partagé avec leurs consommateurs, se pose la question de savoir comment elles vont se distinguer, affirmer leur culture, leur spécificité, leur identité. Aujourd’hui, il est vital pour les entreprises d’avoir une réflexion sur leurs actifs immatériels (marque, culture, capital humain) et sur la façon de les mobiliser dans leur transformation. Et ça, c’est un rôle majeur de la communication.

Il y a urgence pour elles, compte tenu de ces dangers, à préserver leur indépendance à l’égard des plates-formes et à construire une relation directe, libre et voulue avec les consommateurs.

Sinon on va accepter naturellement que la décision appartienne largement aux moteurs de recherche sur 4 critères : la simplicité, la fonctionnalité, la rapidité et le prix. Et ces quatre facteurs de décision vont amener très naturellement les consommateurs à réduire la part donnée aux marques dans leur consommation ou à se tourner vers les propres marques des GAFAM ! »

Et les GAFAM ? les vrais concurrents ?

Et si conseil et pub devaient faire front commun contre les GAFAM (Google-Apple-Facebook-Amazon, Microsoft) ?

GAFAM, cabinets de conseil et groupes de communication, tous se précipitent vers les mêmes territoires de conquête : la maîtrise et l’exploitation de la data et la fabrication de contenus au service d’un marketing hyperciblé et personnalisé.

Les GAFAM auxquels on peut ajouter LinkedIn, Snapchat et les autres réseaux sociaux proposent de plus en plus des solutions apparemment simples d’accès pour régler toute la question de l’achat média, voire de la création de contenus. Au consommateur, ils offrent des boutiques et produits recommandés pour leurs achats en ligne, des flux d’actualités personnalisés et publicités native advertising. En bref, le Big Data a offert aux GAFAM les moyens d’améliorer leur capacité à créer de la valeur pour les consommateurs.

Le combat paraît désormais inégal sur de nombreux plans : capitalisation boursière, mondialisation, volume de données, … Les GAFAM sont les géants.

  • La concurrence est inégale.

Les capitalisations boursières et la dimension globale ne sont pas comparables et l’écart ne cesse de se creuser.

Les modèles économiques sont communs et sont ceux de la pub traditionnelle, même si les GAFAM revendiquent un modèle de gratuité (suivant le principe désormais bien connu « si c’est gratuit c’est vous le produit »). Mais le différentiel entre les revenus et les taux de marge générés ne cessent de s’accroître (participant à la paupérisation de la pub déjà mentionnée).

Dans un modèle revendiqué du gratuit, le revenu de Facebook provient à plus de 90 % de la pub dont une écrasante majorité sur le mobile. Le revenu publicitaire de Google représente plus de 80 % du total. Google concentre à lui seul 90 % des requêtes sur internet dans le monde.

Malgré de lourds investissements, le volume de données que le conseil et la pub peuvent mobiliser ne sera jamais comparable à celui de la masse de données personnelles dont disposent Facebook, Google ou Amazon (données géographiques, réseau d’amis, comportements d’achat, mails, calendrier…).

  • Les stratégies d’alliance sont difficiles.

Les annonceurs réduisent leur nombre d’acteurs pub (les agences lead et les autres) pour se redonner du pouvoir d’achat. Mais la concentration du secteur de la pub trouve des limites (voir l’échec de la fusion Publicis/Omnicom en 2013). La tendance est plutôt à l’achat par les leaders d’agences de niche très spécialisées.

Facebook et Google sont essentiellement des médias et sont à ce titre pourraient être des partenaires des agences de pub. Au-delà d’accords ponctuels, Ils sont surtout leurs concurrents, notamment sur les talents.

Dans un scénario idéal, ces nouvelles concurrences représentent aussi une opportunité car des attelages avec les agences, qui ont une expertise et un historique annonceur en acquisition et surtout en fidélisation, sont toujours possibles, mais ce sont toujours des alliances entre inégaux.

  • Le risque de désintermédiation n’est pas exclu.

Les annonceurs peuvent être tentés de contracter directement avec les grands géants du numérique.

Un autre concurrent à ne pas oublier : « les clients qui internalisent » une marque qui va vouloir avoir en interne une équipe digitale. » Phénomène encore rare ? qui passe plutôt par des plateaux avec un mix des clients et de l’agence.

  • Mais, et il y a un mais, les GAFAM sont pénalisés par leur position dominante.

On ne reviendra pas sur les difficultés des GAFAM à modérer les données et à garantir leur anonymat et plus globalement la cybersécurité. L’analyse se retrouve partout. L’un des scénarios (réaliste ? sans doute ps) est même de démanteler ces géants, en particulier Facebook, dans une logique antitrust.

De manière plus spécifique, les directeurs marketing ne voudront sans doute pas être dépendants d’une seule plateforme. Plus encore, les directions générales ne voudront pas que leur stratégie de communication et leur stratégie commerciale et de développement reposent sur un seul acteur, même en position dominante aujourd’hui.

« Aujourd’hui il existe donc plusieurs planètes qui gravitent autour des annonceurs, dont le conseil, fort de son expertise en digital. Demain, il existera plusieurs galaxies. » Une métaphore qui illustre parfaitement la future étendue et redéfinition du paysage concurrentiel. Dans ce combat, l’atout de la pub reste l’intimité avec les marques si la qualité et la personnalisation restent au rendez-vous. Le conseil, lui, a déjà démontré sa capacité de transformation.

Bibliographie

Esquisse d’une nouvelle économie de la demande, Paris innovation Review Mauro Artibani

14 mai 2018 http://parisinnovationreview.com/article/esquisse-nouvelle-economie-demande

AD AGE AGENCY REPORT 2018: RANKINGS AND ANALYSIS, 29 avril 2018 http://adage.com/article/datacenter/ad-age-agency-report-2018-rankings-analysis/313176/

L’irrésistible domination de la publicité digitale, Les Echos, Véronique Richebois, 1er février 2019,

https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/lirresistible-domination-de-la-publicite-digitale-961048

Comment les agences s’adaptent aux nouvelles formes de concurrence, La réclame, Aude M. et Xuoan D, 1er décembre 2016 https://lareclame.fr/dossier-agences-concurrence-165315

La guerre entre agences de communication et cabinets de conseil n’aura pas lieu, 12 juin 2018 Welcome to the jungle Antoine https://www.welcometothejungle.co/articles/agences-versus-cabinets-conseil

Accenture Interactive, concurrent offensif des agences de pub, Maud Vincent, 6 févr. 2017

http://www.e-marketing.fr/Thematique/agences-1089/Breves/Accenture-Interactive-concurrent-offensif-agences-pub-

Accenture Interactive nommé plus grand réseau mondial d’agences digitales par Advertising Age dans son rapport annuel pour la troisième année consécutive, France News, 3 mai 2018 www.afp.com/fr/infos/1308/accenture-interactive-nomme-plus-grand-reseau-mondial-dagences-digitales-par-advertising-age-dans-son-rapport-annuel-pour-la-troisieme-annee-consecutive-201805030057781

Accenture, le géant qui fait peur à WPP et Publicis, Alexandre debouté, Le Figaro, 28 octobre 2017 http://www.lefigaro.fr/medias/2017/10/23/20004-20171023ARTFIG00269-accenture-le-geant-qui-fait-peur-a-wpp-et-publicis.php

Arthur Sadoun : « Nous sommes dans une course à la transformation du modèle », Les Echos, Véronique Richebois, Fabienne Schmitt ,19 octobre 2018

https://www.lesechos.fr/2018/10/arthur-sadoun-nous-sommes-dans-une-course-a-la-transformation-du-modele-979795

Accenture Interactive, concurrent offensif des agences de pub Maud Vincent, 6 févr. 2017

http://www.e-marketing.fr/Thematique/agences-1089/Breves/Accenture-Interactive-concurrent-offensif-agences-pub-

Accenture sur le point de reprendre la pépite Droga 5, Les Echos, Véronique Richebois, 3 avril 2019 https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/accenture-sur-le-point-de-reprendre-la-pepite-droga-5-1006437

Laurent Habib : « Les marques sont face à une question de survie, il est urgent de riposter » Les Echos, Véronique Richebois, 16 avril 2018

https://www.cbanque.com/actu/rss/les-echos-hightech/803650-laurent-habib-les-marques-sont-face-a-une-question-de-survie-il-est-urgent-de-riposter

McCann injecte une dose supplémentaire d’intelligence humaine à ses outils d’IA, les Echos, 12 mai 2019,

Véronique Richebois,  https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/mccann-injecte-une-dose-supplementaire-dintelligence-humaine-a-ses-outils-dia-1018039

L’Intelligence artificielle apporte plus de finesse à la publicité ? Les Echos, Franck Lewkowicz, le 19 mars 2019. https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-180513-lintelligence-artificielle-apporte-plus-de-finesse-a-la-publicite-2162294.php

Google repose toujours en grande partie sur ses revenus publicitaires — mais cette dépendance se réduit progressivement, Business insider, Chisato Goya, 6 février2019

https://www.businessinsider.fr/graphique-du-jour-google-revenus-publicitaires

Comment l’UX peut-elle sauver la publicité, Pubosphère, juillet 2018, ADBLOCKTEAM

https://pubosphere.fr/comment-lux-peut-elle-sauver-la-publicite/

Categories: Analyse|Mots clés : , , , , , , , , |

Vous pourriez également être intéressé par :

  • Pierre Nanterme, PDG d’Accenture monde nous a quitté

    Le départ prématuré de Pierre Nanterme, au terme d’une carrière exemplaire et de la réalisation d’une profonde mutation dans le digital, laisse Accenture orphelin. L’hommage au leader français visionnaire, bienveillant et inspirant qu’il a toujours été, est unanime.